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Journée de l’UA : Mon projet pour une vraie réforme de l’institution (Par Karfala Aminata Condé)

Le 25 mai 1963, les bases de l’Organisation de l’Unité Africaine ont été jetées à Addis-Abeba, en Éthiopie. Quatre décennies plus tard, l’OUA est devenue l’UA pour dire Union Africaine. 57 ans après, l’organisation qui devrait permettre à l’Afrique de jouer sa partition dans les relations internationales et « corriger certaines injustices du monde » est encore, pour ainsi dire, au stade d’un simple projet sur papier.

Si on s’en tient à l’acte constitutif de l’union, on dirait que l’organisation manque de résultat et ses objectifs sont encore, par conséquent, à atteindre.

Malgré plus d’un demi-siècle d’existence, l’union Africaine peine toujours à «réaliser une plus grande unité et solidarité entre les pays africains et entre les peuples d’Afrique», comme on peut lire dans son acte fondateur adopté le 11 juillet 2000 à Lomé au Togo.

Il est donc temps d’opérer une réforme profonde de l’institution pour qu’elle quitte le stade d’un simple club des dirigeants africains au service des puissances occidentales et surtout soucieux de se maintenir au pouvoir.

L’UA doit céder à une véritable organisation d’intégration des peuples africains à la base et surtout devenir un acteur indépendant et influent sur le continent mais aussi sur la scène internationale.

Pour ce fait, je propose un logiciel que j’articule ici en trois grands axes à savoir la sélection des fonctionnaires, la composition structurelle ainsi que le financement de l’Union.

Au titre du premier axe, je crois que le moment est venu pour l’institution de se reconstruire et s’adapter aux souffles de la démocratie. Il s’agit en clair de permettre aux populations africaines de comprendre la procédure de recrutement des fonctionnaires de l’Union Africaine. Pourquoi pas leur permettre de choisir directement ou indirectement leurs représentants dans l’organisation ?

L’Union Européenne, à travers son parlement, est aujourd’hui un acteur incontournable dans la vie des citoyens. Cela se traduit par l’importance que suscite les élections européennes. Et combien de domaines de la vie dans le vieux continent sont de nos jours régis par des actes de l’UE ?

Deuxièmement, le monde a évolué : les réalités sociopolitiques de maintenant et d’il y a 20 ans, 30 ans ou 40 ans en arrière ne sont pas les mêmes. C’est pourquoi, en plus des organes administratifs traditionnels, l’organisation devrait créer et outiller des comités techniques pour faire face aux défis majeurs du monde actuel dont le terrorisme, la santé et la justice sociale en Afrique entre autres. Pas besoin de plaider pour la suppression des organes qui ne rapportent pas grand-chose ou qui, tout simplement, constituent des sources de conflit notamment de compétences dans l’organisation. Au titre de ces organes, je cite la présidence en exercice qui, non prévu par l’acte constitutif, engloutit sans cesse la commission de l’Union pourtant organe légal de direction de l’institution.

Troisièmement, il n’y a pas d’organisation internationale efficace sans budget conséquent. Mais l’essentiel du financement de l’Organisation de l’Unité Africaine est faite par des entités extérieures à l’Afrique. Par exemple, en 2010 et 2011, les budgets de programme de l’Union Africaine ont été respectivement financés à hauteur de 92 et 92,5 % par l’’extérieur notamment l’union européenne. Où se trouve donc l’indépendance de l’institution ? Pourra-t-elle ainsi s’affirmer devant ses bailleurs de fonds ? Ou peut-on alors parler d’efficacité ou même tout simplement d’objectivité ? Liberté à chacun d’en juger !

Enfin, il faut dire que l’Afrique a le mérite d’instituer une organisation internationale qui réunit tous les états du continent. Ce qui est du jamais vu ! Mais l’Union peine à rentrer dans le quotidien des africains et il le faut pour impliquer ces derniers dans sa consolidation. Et quel meilleur moyen pour cela que d’ériger au sein de la cour africaine de justice un troisième degré de juridiction pour que les africains, se sentant lésés par les deux degrés traditionnels de juridictions nationales, puissent se pourvoir en cassation au niveau de l’institution ? C’est seulement comme cela qu’elle pourra porter le flambeau de la justice sociale sur le continent. Un sentiment perdu chez nous il y a des lustres !

Si l’on veut « Bâtir une Afrique intégrée, prospère et en paix, dirigée par ses citoyens et constituant une force dynamique sur la scène mondiale », tel qu’énoncé par l’Union Africaine dans son plan stratégique 2009-2012 et réitérée en mai 2013 lors du 21e sommet des chefs d’états de l’Union à l’occasion de son cinquantenaire, les pays africains n’ont de choix que de s’intégrer avant d’intégrer le tout mondial.

De nos jours, tout porte à croire que les siècles, les millénaires (voire le reste de la vie) à venir seront pour les grands blocs politico-économiques. De véritables blocs régionaux, l’Amérique en a depuis bientôt trois siècles, l’Europe aussi est en train de construire valablement le sien. Et l’Afrique ? Pour ne pas dire qu’elle n’en a jamais eu, disons qu’elle peine toujours à insuffler de véritables dynamiques aux organismes d’intégration qu’elle ne cesse de mettre en place. Alors que dans un monde aussi global que le nôtre où seule l’intégration peut épargner de la ruine et de la perte, l’Afrique doit cesser de demeurer un mouton de Panurge pour devenir un meneur ou du moins un acteur comme tout autre. Sinon, elle se serait condamnée à suivre la marche du monde comme elle suit la league des champions à la télé.

Karfala Aminata Condé

Politologue et journaliste free-lance