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Tribune-Alpha Condé ou la grosse déception !

En 2010, il nous avait privés de la rupture dont le pays avait tant besoin en bourrant son gouvernement de rescapés des régimes passés. Des régimes qu’il nous disait avoir pourtant combattus pendant qu’il était dans l’opposition.

En 2020, il veut encore priver la jeunesse et le pays d’une chance de rompre avec le passé en nous obligeant à mener un combat qui n’avait vraiment pas lieu d’être. Quel égoïsme !

L’année 2020 aurait pourtant pu être une chance pour la jeunesse de ce pays. Au lieu de cela, nous sommes encore en train d’être plongés dans le passé ténébreux d’il y a près de 20 ans. C’est comme si le temps est resté figé, car nous voilà en train de revivre le calvaire d’octobre et novembre 2001.

À l’époque, nous avions le MORAD (Mouvement contre le référendum et pour l’alternance démocratique) qui regroupait les partis d’opposition dont le RPG d’Alpha Condé. À ce référendum de 2001, Lansana Conté n’était âgé que de 67 ans officiellement.

Aujourd’hui, nous avons le FNDC (Front National pour la Défense de la Constitution) qui regroupe les forces sociales et politiques qui s’opposent au changement de constitution à la faveur d’un président qui est pourtant âgé de plus de 81 ans.

À quoi avaient vraiment servi toute cette lutte et tous les morts enregistrés à l’époque ? En 2001, Lansana Conté avait ‘’remporté’’ son référendum malgré l’appel au boycott de l’opposition. Aux élections présidentielles qui suivront en 2003, il sera ‘’réélu’’ pour un mandat de 7 ans qu’il ne mènera ni en paix, ni à terme. Durant ce mandat de trop, le pays sera secoué par des troubles sociaux et des manifestations qui feront plus de 300 morts entre 2006 et 2007.

C’est en ce moment que les guinéens y compris Alpha Condé et ses alliés d’aujourd’hui ont dit plus jamais ça. Plus de présidence à vie en Guinée. À cause de cette douloureuse expérience, nous avons donc inscrit dans notre nouvelle constitution la limitation des mandats que nous avons verrouillée par l’article 154. Mais malheureusement, c’était sans compter avec la gourmandise et l’égoïsme d’Alpha Condé. Quelle déception !

Avec un autre, on aurait peut-être pu l’imaginer, mais pas avec un Alpha Condé qui de 1991 à 2010 disait se battre pour la démocratie et l’alternance en Guinée. Une fois au pouvoir et maintenant que son second mandat est presque arrivé à terme, c’est lui qui veut détruire toutes les avancées démocratiques qui ont été réalisées au prix du sang de plusieurs de nos compatriotes tombés dans les manifestations de 2006, 2007 et 2009.

Il a trahi son serment et a trahi la Guinée. Le pays n’a pas besoin d’une nouvelle constitution. Ce dont nous avons besoin, c’est l’eau, l’électricité, la sécurité, les infrastructures routières et sanitaires et un bon système éducatif. Toutes les insuffisances ou améliorations qu’il avance comme arguments pour justifier la nécessité d’une nouvelle constitution peuvent être résolues par de simples amendements ou par des lois organiques.

Par ailleurs, la Guinée n’a pas tellement changé en dix ans pour qu’on nous dise que parce que les temps ont changé, on devrait se doter d’une nouvelle constitution. La Constitution américaine est vieille de plus de 230 ans et pourtant, s’il y a un pays aussi dynamique et où les choses évoluent très rapidement, c’est bien les États-Unis. Cependant la Constitution américaine de 1789 est toujours celle qui est en vigueur et pourtant l’Amérique de la fin du 18ème siècle n’est pas la même que celle de ce 21ème siècle.

S’il y a bien une chose qu’Alpha Condé peut laisser à la postérité aujourd’hui, c’est la sauvegarde de notre démocratie naissante et l’alternance qui en constitue le pouls. Il ne faudrait pas qu’on accepte qu’il nous fasse reculer. Beaucoup de sacrifices et d’efforts ont été consentis pour que nous soyons où nous sommes aujourd’hui. Il ne faudrait pas que tout cela ait été pour rien. Nous méritons mieux.

Abdoulaye J Barry
ajbarry@live.com

Portland, USA