Dès sa prise du pouvoir le 05 Septembre dernier, le CNRD, à sa tête le Colonel Mamady DOUMBOUYA, a montré une ferme volonté de « requalification » du système éducatif guinéen.
Il était donc question de trouver les hommes et les femmes pour piloter de façon efficiente la politique nationale de l’éducation et de la formation afin de doter la Guinée d’une « éducation de qualité, équitable et inclusive ainsi que la possibilité d’apprentissage tout au long de la vie » comme le stipule l’ODD4.
Le choix n’a pas été si facile, j’en suis convaincu, car plusieurs cadres étaient pressentis ; néanmoins, ceux qui ont bénéficié de la confiance du président de la transition et celui du premier ministre, font déjà l’unanimité quant à leur capacité de bâtir une école nouvelle pour une nouvelle Guinée. Il s’agit de : Guillaume HAWING, Alpha Bacar BARRY et Dr Diaka SIDIBE.
-Qui sont-ils réellement ?
-Quels sont les chantiers ou défis majeurs auxquels ils devront faire face ?
Guillaume HAWING, Ministre de l’Enseignement Pré-Universitaire et de l’Alphabétisation (MEPUA)
Guillaume est un fruit de l’université guinéenne, précisément Gamal Abdel NASSER de Conakry (40è promotion, titulaire d’un diplôme d’ingénierie en électro-énergétique). Enseignant-Chercheur, responsable d’établissement et homme politique ; Guillaume s’est surtout rendu célèbre grâce à son «invention » en algorithme mathématique permettant de générer, d’organiser et de repartir par ordre les nombres premiers, publiée en février 2016. Depuis lors, il a participé à de nombreux et importants colloques, animé des conférences, publié un ouvrage et plusieurs articles scientifiques. Il obtint ses plus importantes distinctions en 2019 au Salon International Innovation Week in Africa (IWA 2019) tenu à Rabat (Maroc) : Deux médailles d’or et un grand prix de science et d’innovation.
Parmi les défis auxquels Guillaume HAWING devra faire face, nous pouvons noter :
- la restauration de la confiance avec les partenaires sociauxde l’éducation, notamment les syndicats et la réunification de tous les acteurs au tour d’un idéal commun, au tour de « l’essentiel » en vue de la qualification de l’éducation ;
- la gestion durable des crises récurrentes liées aux conditions de vie et de travail précaires des enseignants ;
- la lutte contre la corruption exacerbée, notamment lors des examens scolaires et l’anéantissement des réseaux mafieux qui prennent le secteur en otage ;
- la refondation de l’enseignement privé à travers une révision systématique des textes réglementaires ;
- la restructuration du MEPUA à travers la création, entre autres, d’un Office National du Baccalauréat et la Direction Nationale de l’Enseignement Privé ;
- la formation des formateurs sur les pédagogies actives et selon les exigences du XXIe siècle (digitalisation)
- la révision et l’adaptation des programmes d’enseignement, …
Alpha Bacar BARRY, Ministre de l’Enseignement Technique et la Formation Professionnelle (METFP)
Alpha Bacar est un ‘’jeune cadre’’, disons un expert, bien connu et respecté en Guinée et au niveau international. Il est diplômé en lettres et journalisme à l’Université Gamal Abdel NASSER de Conakry, d’un master I de management d’organisation à l’Université de Stirling, un master 2 de management opérationnel à l’université de Cambridge et un Exécutive Master en Management Technologie et Innovation à l’Ecole Polytechnique de Paris.
Ancien journaliste à la Radio Télévision Guinéenne (RTG), il devient consultant de l’organisation des Nations unies pour le développement industriel (ONUDI) en Afrique après ses études en Europe. Alumni du programme américain YALY (Young African Leaders), initié sous la présidence de Barack OBAMA et PDG de Jatropha Hub, il a parrainé beaucoup d’organisations juvéniles telle la Jeune Chambre Internationale Conakry Lumière et contribué à la formation et l’émergence de beaucoup de jeunes entrepreneurs guinéens.
Alpha Bacar a d’énormes défis à relever au sein du METFP dont, entre autres :
- Redorer l’image de l’Enseignement Technique et la Formation Professionnelle à travers un marketing social de grande envergure ;
- doter le pays d’une main d’œuvre qualifiée dont la formation est adaptée aux besoins du marché et aux grandes orientations des programmes de développement ;
- renforcer et actualiser les compétences des formateurs et des encadreurs ;
- créer de meilleurs cadres d’études et de travail pour les apprenants et les encadreurs ;
- élargir les ERAM (Ecoles Régionales des Arts et Métiers) au niveau des préfectures et des sous-préfectures,…
S’il (Alpha Bacar) réussit à relever ces différents défis-ce que nous n’en doutons guère-, la problématique du chômage accru serait, dans quelques années, un lointain souvenir en Guinée.
Dr Diaka SIDIBE, Ministre de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche Scientifique et de l’Innovation (MESRSI)
Dr Diaka est une jeune scientifique dont les compétences, le parcours atypique et la capacité managériale imposent respect et admiration.
Géoscientiste, détentrice d’un Doctorat obtenu en 2015 au Maroc et enseignante-chercheuse, elle fût lauréate des oscars de la femme guinéenne en Sciences et Techniques en 2016. Activiste et Passionnée de sciences de la Terre, elle a enseigné dans plusieurs universités guinéennes et dirigé un laboratoire de matériaux et mécanique des sols comme elle l’indique dans un de ses blogs.
Par ailleurs, affirme-t-elle, elle a également plusieurs années d’expériences dans le monde des Laboratoires de Bâtiments et de travaux Publics, surtout au Maroc. En 2013, Dr Diaka bénéficia de la bourse « Eugen Ionescu » du bureau AUF Europe centrale et orientale. Ainsi, elle participa, entre 2013 et 2014, à plusieurs colloques et conférences internationales en France et en Roumanie. Ses travaux de recherche sont publiés dans plusieurs revues internationales.
Après avoir été Cheffe de Département dans une université privée Roi de Conakry, elle fût nommée en 2019 : Directrice Générale de l’Institut Supérieur des Mines et Géologie de Boké. Là, elle laissa des traces indélébiles en termes de modernisation, de construction-rénovation et de formation des formateurs qui lui valurent la nomination à la tête du MESRSI.
A l’instar de ses homologues des deux autres sous-secteurs de l’éducation et de la formation (MEPUA et METFP), Dr Diaka SIDIBE fera aussi face à de nombreux défis dont :
- la modernisation de l’Enseignement Supérieur à travers la construction d’infrastructures adéquates et la digitalisation ;
- la promotion de la Recherche Scientifique et l’Innovation ;
- la formation des Formateurs et l’amélioration de leurs conditions de vie et de travail ;
- la moralisation du sous-secteur Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique, notamment la lutte contre les faux diplômes et l’installation frauduleuse d’étudiants non bacheliers tant bien dans les universités publiques que privées.
A ces défis sous-sectoriels, tous les trois ministres devront s’atteler, avant tout, à la mise en place de leurs différents cabinets afin de s’entourer de cadres compétents, visionnaires et intègres qui leur aideront à réussir leurs différentes et délicates missions. Car, avant eux, de grandes sommités intellectuelles et de très hauts cadres ont aussi occupé ces postes, malheureusement, ils manquaient d’équipes et de bons conseillers.
Ils devront, in fine, travailler ensemble ainsi qu’avec tous les acteurs de l’éducation nationale afin d’élaborer une ‘’nouvelle loi d’orientation du système éducatif guinéen’’ qui constituera notre nouvelle politique nationale de l’éducation adaptée à nos valeurs socio-culturelles, à notre histoire, à notre époque et à nos aspirations en termes de développement économique.
Car, comme l’a dit le Président de la transition, Colonel Mamady DOUMBOUYA : «l’avenir de notre pays passe par les écoles». Autrement dit : «Tant vaut l’école, tant vaut la nation».
Aboubacar Mandela CAMARA
Sociologue/Consultant en éducation/Auteur