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Chronique de Thierno Monénembo : Alpha Condé, un président au-dessus de tout soupçon

Le mythe savamment monté de l’exception Alpha Condé n’aura duré que le temps d’un bluff, l’espace d’un cillement

Pourtant, les plus lucides avaient déjà ouvert les yeux pour faire tomber le masque de celui que les officines parisiennes tiennent à faire passer pour « l’opposant historique, le premier président démocratiquement élu, le Mandela de son pays : la Guinée. Hélas, cela ne se pas passe comme ça aujourd’hui : les juments de course sortent des meilleurs haras et les grands leaders, des meilleures agences de communication. Le produit est fignolé, l’emballage impeccable. Mais le manant a vite fait de montrer ses zones d’ombre, ses lignes de faille et sa part cousue de fil blanc.

À l’aise dans une démocratie du troisième type

La baudruche « Mandela guinéen » se dégonfle le jour même de sa confection, je veux dire le jour même de son élection. Péniblement arrivé au second tour avec 18 % contre 44 à son adversaire, Alpha Condé sera déclaré vainqueur (53 %) au second, alors qu’entre-temps, cinq mois se seront écoulés et que le fichier électoral aura été ravagé par un feu venu de nulle part ! Ne rigolons pas : c’est cela, la démocratie du troisième type !

Vérité des urnes ou pas, l’essentiel est fait : il est investi président de la République de Guinée. Sous les doux cieux d’Afrique, point besoin de mérite pour accomplir ce genre de prouesse. Quelques amis bien placés suffisent largement. Et des amis riches et puissants, Alpha Condé en a à revendre : Bernard Kouchner, Michèle Alliot-Marie, Abdou Diouf, Omar Bongo, Denis Sassou Nguesso, François Soudan, Jacob Zuma, François Hollande, Eduardo Dos Santos, Vincent Bolloré, Tony Blair, etc. Des gens de bien, des gens comme il faut, surtout les gens qu’il faut : à eux seuls, ils pèsent plus lourd que la vérité des urnes.

Une réincarnation de ses prédécesseurs

Les plus pessimistes pensaient que notre président-professeur se dépêcherait de nous faire oublier sa désastreuse élection en s’occupant de guérir les Guinéens des méfaits de ses prédécesseurs. C’était mal le connaître. Au contraire, le tribalisme et la corruption, le pouvoir personnel et les violences policières ont repris de plus belle. À croire que Sékou Touré, Lansana Conté et Dadis Camara se sont ligués pour redoubler de férocité. Dix ans de mandat et rien de bien positif. L’économie ? À vau-l’eau. La démocratie et les droits de l’homme ? Le cadet de ses soucis.

Son parti, le RPG, fonctionne sur le modèle du PDG de Sékou Touré, le parti-État type. C’est là que se prennent les grandes décisions. Il en est toujours le chef, en violation totale de la Constitution qui lui interdit d’occuper une charge autre que celle de chef de l’État. On puise davantage dans les caisses de l’État qu’au temps de Lansana Conté et la police a la gâchette aussi facile qu’au temps de Dadis Camara. Cent vingt manifestants tués à bout portant, neuf rien que la semaine dernière ! Et tenez-vous bien, les massacres du 28 Septembre n’ont toujours pas fait l’objet d’un procès au grand dam de l’ONU et des organisations comme Amnesty International et Human Rights Watch.

Un président comme les autres et même pire

Bref, les masques sont tombés, « l’opposant historique » est devenu un chef d’État africain comme un autre. Il fait ce qu’il veut, fût-ce au mépris de la morale et du droit. La date des élections législatives n’est toujours pas fixée alors que le mandat des députés a expiré depuis un an et demi. Les municipales, elles ont eu lieu depuis le 4 février 2018, mais les conseils de quartier, les conseils municipaux de certaines villes et les conseils régionaux ne sont toujours pas formés.

C’est vrai que le gouvernement a intérêt à lambiner sinon l’opposition emporterait 5 conseils régionaux sur 8 et à Conakry, l’UFDG de Cellou Dalein Diallo, à elle seule, occuperait 75 sièges de conseil de quartier sur 128. Et puis, de toute façon, « le Mandela de la Guinée » a un autre souci en tête : s’octroyer coûte que coûte un troisième mandat, quitte à marcher sur des monceaux de cadavres.

Je vous le disais, (les slogans lénifiants des cabinets de communication n’y peuvent rien), Alpha Condé est un vrai chef d’État africain : le pouvoir, tout le pouvoir, le pouvoir par tous les moyens, le pouvoir pour le pouvoir, le pouvoir pour toujours.

Par Tierno Monénembo, in Le Point

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