Dans un pays où tous les droits et libertés des citoyens sont respectés, les victimes de démolition de leurs habitations et de déguerpissement auraient pu organiser des manifestations pacifiques pour amener l’État à prendre en compte leur situation.
Mais beaucoup de Guinéens ont pensé à un moment qu’ils n’auraient jamais besoin de recourir à des manifestations sur la voie publique. Ils se sont convaincus eux-mêmes que les manifestations n’intéressent que les partis politiques ou militants de l’opposition.
Ils ont aidé l’État à diaboliser et à criminaliser ce qui est un droit constitutionnel : celui de manifester. Ils ont intégré l’idée que manifester est synonyme de violence et que c’est l’affaire de ‘’l’Axe’’. Or, c’est un droit qui permet aux citoyens, dans certaines circonstances, de faire connaître aux pouvoirs publics leurs demandes, leurs problèmes, leurs préoccupations, leurs désaccords sur des sujets d’intérêt national. C’est pourquoi, le droit de manifester comme le droit de pétition est prévu par toutes les législations modernes.
Aujourd’hui, les citoyens ne disposent d’aucun moyen efficace pour exprimer les préoccupations qui sont les leurs, l’État ayant supprimé de fait le droit de manifester sous le regard complaisant de nombreux Guinéens. Il (l’État) peut tout faire actuellement sans se soucier de l’impact négatif de ses actes ou décisions sur la vie quotidienne de ses citoyens. Un Etat qui n’a peur de rien de la part de ses citoyens est un État dangereux pour eux.
L’État peut actuellement prendre les décisions les plus impopulaires sans aucune crainte de susciter une quelconque résistance de la part des citoyens. Si, par exemple, le Gouvernement décidait dans les jours à venir d’augmenter le prix du carburant, il pourrait le faire sans aucune crainte de contestation. Aussi impopulaire soit cette mesure, elle passerait comme lettre à la poste.
En restreignant les droits et libertés individuels, l’État est devenu si fort qu’il risque d’écraser les citoyens.
Moralité, les citoyens ne doivent céder aucune portion de leurs droits et libertés à l’État. Sinon, ils finiront par les perdre progressivement.
Par Mohamed TRAORE