La séance qui nous réunit ce matin, est celle légale de l’ouverture solennelle de la 2ème Session Ordinaire de l’Assemblée Nationale, consacrée à l’examen et à l’adoption du Budget de l’État. Légale parce que cette date du 7 Octobre a été retenue conformément aux dispositions de l’Article 68 de l’actuelle Constitution de notre pays. Solennelle à cause du haut niveau de représentativité des personnalités et des Institutions qui y ont été conviées.
Nos travaux commencent après la fin récente de la Session Extraordinaire de notre Assemblée à l’issue de laquelle la LFR a été adoptée et cela, après que nous ayons organisé le Débat d’Orientation Budgétaire (DOB) auquel nous avons invité le secteur privé et les organisations de la société civile dont celles représentatives des femmes et des jeunes auxquels Son Excellence Monsieur le Président de la République a dédié son mandat.
Au cours de ce débat d’orientation budgétaire, nous nous sommes accordés sur les grandes orientations de la politique gouvernementale globale et des politiques sectorielles ayant pris en considération les préoccupations du secteur privé et de la société civile.
Les échanges fructueux qui ont animé ce débat, ont été l’occasion pour nous, de comprendre que les perspectives de croissance à moyen terme de notre pays restent positives malgré un environnement sociopolitique tendu, du fait des très prochaines échéances électorales et d’une conjoncture mondiale un peu moins favorable.
Le taux de croissance économique sera en effet élevé par rapport à la sous-région, en se maintenant au niveau de 6% en termes réels en 2020. La production de bauxite ayant doublé ces 3 dernières années conduira le pays en être le premier exportateur mondial dans les 3 prochaines années. Quant à la production agricole en général et celle du riz en particulier, leur augmentation présage de l’atteinte à plus ou moins brève échéance de l’autosuffisance alimentaire.
Ces bonnes perspectives restent fortement dépendantes de la poursuite de l’assainissement des finances publiques, pour réduire le déficit budgétaire à 3% du PIB. Ces performances dépendent aussi grandement de la poursuite des réformes structurelles, y compris celles relatives au développement du secteur privé guinéen, pour en faire le moteur de la croissance.
À ce titre, l’Assemblée Nationale recommande la coordination des politiques fiscales avec celles qui sont en vigueur dans les pays de la CEDEAO, afin de conforter la compétitivité de nos industries locales dans le cadre de l’entrée en vigueur du nouveau tarif extérieur commun (TEC) et de la mise en place prochaine de la zone continentale africaine de libre-échange (ZLEC).
Cette recommandation est valable pour tout pays comme le nôtre aspirant à l’émergence ; car il faut que nos pays déploient de très importants efforts dans la mobilisation des recettes publiques intérieures, en comptant beaucoup plus sur la fiscalité intérieure que sur celle de porte, pour atteindre 20% du PIB.
Ce niveau qui n’est actuellement pour la Guinée que de 13% lui permet à peine de bien faire fonctionner le Gouvernement.
Un accent particulier devra de ce fait être mis sur la poursuite des reformes tant de la politique économique en général que de l’administration fiscale en particulier, en agissant beaucoup plus sur l’élargissement de l’assiette fiscale que sur l’augmentation des taux d’imposition.
L’Assemblée Nationale encourage donc vivement le Gouvernement à poursuivre la signature des contrats de performance avec les régies financières et à exiger que le paiement des impôts et taxes passe par les banques servant de transit rapide pour en améliorer le travail de recouvrement à moindre coûts.
Une meilleure tarification de la nouvelle économie numérique est aussi fortement conseillée car cette nouvelle économie est en passe de devenir le secteur le plus porteur, comparativement aux autres secteurs classiques porteurs de croissance.
L’Assemblée Nationale est consciente du fait que notre pays a encore ses finances publiques sous pression.
C’est pourquoi nous recommandons au Gouvernement de continuer à faire recours aux Partenariats Public – Privé (PPP), afin de mobiliser les ressources du secteur privé pour construire des infrastructures très coûteuses, essentiellement dans le secteur des routes et celui de l’énergie ; car celles-ci sont nécessaires pour valoriser notre important potentiel de développement en maintenant un cadre macro-économique viable.
C’est la raison pour laquelle nous avons toujours recommandé et nous ne cesserons de le faire au Gouvernement, de prendre toutes les dispositions utiles pour rendre les investissements plus importants et plus efficaces, en vue de combler le déficit actuel d’infrastructures qui constitue le goulot d’étranglement de notre développement.
Mais si les Partenariats Public – Privé peuvent être plus efficaces que les marchés traditionnels et représenter une occasion importante pour les États de mettre en œuvre les programmes de développement ambitieux, ils peuvent aussi présenter des risques budgétaires et des risques de défaut de construction d’où la pertinence de la recommandation parlementaire demandant au Gouvernement de veiller à ce que le processus de contractualisation des PPP soit très transparent et que les engagements du Gouvernement soient garantis.
L’Assemblée Nationale réitère sa recommandation au Gouvernement de poursuivre les louables efforts en cours, d’élaboration et de mise en œuvre de politiques macro-économiques ambitieuses, reposant en particulier sur les 3 piliers ci-après :
- L’amélioration du climat des affaires ;
- La formation d’une main d’œuvre de qualité, consciencieuse et respectueuse de la chose publique et de la chose privée, surtout la formation des hauts fonctionnaires ayant une bonne culture de grands commis de l’État doublés d’un sens aigu de l’intérêt supérieur pour la chose publique ;
- Le développement d’un secteur financier national fort, facilitant au secteur privé l’accès à des financements appropriés.
Honorables Députés,
Monsieur le Premier Ministre, Chef du Gouvernement,
Mesdames et Messieurs,
Sachant aussi que le préalable aux investissements efficaces, que nous avons tantôt appelés de tous nos vœux, se trouve être dans les dossiers bancables issus de bonnes études de faisabilité, l’Assemblée Nationale invite le Gouvernement à s’investir davantage dans la constitution d’une banque de données sur les projets banquables et dans le passage du budget national actuel lié aux moyens, à un véritable budget-programme dont l’exécution et l’évaluation permettront de mieux mesurer l’impact positif de l’action publique sur les populations.
Toutefois, il faut dire que toutes les attentes de chacune et de chacun de nous, tout ce que nous attendons du Gouvernement n’est possible que si toutes les Guinéennes et tous les Guinéens se donnent la main pour travailler davantage afin de l’accompagner dans les efforts qu’il est en train de déployer pour la transformation de notre pays.
C’est seulement à cette condition que la Guinée pourra maintenir sa stabilité politique, macroéconomique et financière, et préserver la dynamique de la croissance économique en cours.
Je veux saisir l’occasion qui m’est offerte aujourd’hui chers Collègues, pour saluer et citer en exemple l’extraordinaire réussite de l’exécution du projet de rénovation, d’extension et d’équipement de l’Hôpital National de Donka.
Cette nouvelle formation sanitaire dont est ainsi doté notre pays par le Gouvernement, peut devenir un grand centre d’attraction des patients de la sous-région voir d’ailleurs, permettre à la Guinée de faire d’importantes économies de devises actuellement dépensées au titre des évacuations, et renforcer le niveau des avoirs extérieurs du pays à la Banque Centrale.
Cela est tout à fait possible si ce nouvel Hôpital est bien géré, ce qui n’est possible que si l’État accepte d’opter pour un contrat de concession avec une formation sanitaire privée de très haut niveau d’expertise, capable de gérer efficacement des praticiens très qualifiés qu’il convient de recruter, en partie par ce partenaire privé et en partie par l’État Guinéen, bien avant l’ouverture de l’Hôpital.
C’est cela et cela seulement qui mettra cette nouvelle entité à l’abri de la mauvaise gestion et de certains risques de vols au niveau des centres d’activités que sont, surtout le Laboratoire, la Pharmacie et l’Imagerie.
Enfin, avec l’espoir que cette dernière session budgétaire va se dérouler cette fois-ci dans une atmosphère plus sereine pour permettre à la Représentation Nationale de doter le Gouvernement d’un bon budget pour l’exercice 2020, et avec l’espoir que les conseils prodigués au Gouvernement par la Représentation Nationale seront suivis par lui pour lui permettre de prendre de bonnes décisions dans le cadre de la bonne gouvernance tout au long de l’année 2020, je déclare ouverte la session ordinaire consacrée au Budget de l’État pour l’année 2020.
Je vous remercie.
Conakry, le 7 Octobre 2019
Hon. Claude Kory KONDIANO