Pour faire face au refus de la plupart des enseignants titulaires à donner cours suite à la « grève générale et illimitée », déclenchée par le SLECG d’Aboubacar SOUMAH, le MENA (Ministère de l’éducation nationale et de l’alphabétisation), a fait recourt aux services des diplômés des ENI et de l’ISSEG. En tout cas, officiellement !
Ces contractuels furent, dès au départ, décriés par leur faible niveau et inexpérience, dit-on. Tant bien que mal, certains d’entre eux ont tenu le coup en continuant, semblerait-il, à donner cours. D’autres, par contre, se sont vaqués à leurs activités habituelles au lieu d’aller se faire humilier par les élèves.
Trois mois après l’ouverture officielle des classes, le gouvernement vient de commencer le payement de ce qu’il appelle «prime d’encouragement».
Cette prime que nous jugeons dérisoire (400.000 GNF/Mois) peut orchestrer de conséquences désastreuses, notamment la corruption, l’abandon de poste, l’exploitation des élèves et le découragement.
En effet, il n’est l’ombre d’aucun doute que la vie est extrêmement chère en Guinée, le niveau de vie du guinéen se dégrade de jour en jour. Dans ce contexte de vie pénible, payer un enseignant à la somme de 400.000 GNF (un montant inférieur même au SMIG) n’est nullement une prime d’encouragement.
Déjà, comme nous le savons tous, la corruption gangrène le système éducatif guinéen depuis plusieurs décennies. Ceci est une autre occasion pour ces pauvres contractuels de passer par toutes les formes de corruption dont le marchandage (la vente) des notes afin de pouvoir joindre les deux bouts.
Certains d’entre eux, j’en connais quelques-uns, n’hésiteront aucune seconde d’abandonner leurs postes pour vaquer à autre chose leur permettant de se tirer d’affaires à la fin du mois (frais de logement, de transport, de nourriture,).
En milieu rural surtout, les enseignants vont, comme d’habitude, utiliser les élèves pour exécuter les travaux champêtres ou pour collecter des fagots de bois à revendre dans la plus part des cas.
D’autres vont faire semblant d’enseigner en passant une grande partie de leur temps à raconter leur histoire, à draguer les petites filles, à quémander de l’argent aux élèves, à vociférer des citations de penseurs de l’antiquité grecque, à parler de politique ou encore de football.
En fin de compte, c’est le système éducatif, déjà moribond, qui en souffrirait davantage. Ce qui compromettrait, une fois encore, l’avenir des générations montantes et empêcherait la Guinée, château d’eau et scandale géologique, à sortir de l’ornière.
A présent, il reste à savoir : Est-ce que tous les contractuels qui seront payés ont effectivement donner cours ?
Aboubacar Mandela CAMARA
Sociologue/Enseignant-Chercheur/ Consultant en éducation