En France, un collège de onze experts – syndicalistes, universitaires, chefs d’entreprises – a remis mardi 21 janvier un rapport au gouvernement et au président de la République qui prône une simplification du droit des étrangers et la régularisation des personnes non expulsables.
Il y a urgence à mettre fin aux « situations de non-droit » qui grippent l’intégration des migrants, juge l’ancien patron de l’agence française en charge des réfugiés, Pascal Brice, coauteur du rapport.
Les demandes d’asile ont augmenté de 7% en France, à rebours de la tendance globale européenne, comme l’ont révélé les statistiques de l’immigration publiées ce mardi. La France est encore très loin d’être le premier pays d’accueil, mais si on a cette augmentation, c’est parce qu’on n’a pas de politique migratoire. C’est le résultat d’une politique « complexe et illisible », estime l’ancien directeur de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) aujourd’hui conseiller à la Cour des comptes. « On aboutit à une multiplication de situations de non-droit, avec des gens qui ne sont ni régularisés ni reconduits ».
Patrick Weil est directeur de recherche au CNRS et co-auteur du rapport. Pour lui, il ne s’agit pas d’ouvrir massivement les portes à l’immigration, mais simplement de respecter les valeurs de la France.
25 propositions pour une « refonte complète du droit »
Dans le rapport d’une centaine de pages, 25 propositions pour une « refonte complète du droit » sont présentées. Parmi elles, la création d’un poste de haut-commissaire à l’asile et l’immigration rattaché au Premier ministre et qui ne serait donc plus de la compétence de l’Intérieur.
Autre proposition du rapport : une agence de l’asile, qui prendrait en charge l’intégralité du parcours des demandeurs et remplacerait divers organismes qu’ils croisent, dont l’Ofpra.
Une refonte de la durée des titres de séjour
Le rapport propose également une simplification et un renforcement des droits des émigrés légaux. Cela passerait notamment pour une refonte de la durée des cartes de séjour, comme l’explique Patrick Weil.
« Aujourd’hui, la plupart des émigrés légaux en France ont des cartes d’un an. Comme elles leur sont données avec du retard, quasiment trois mois après avoir reçu la carte d’un an, ils doivent repartir pour le processus angoissant de renouveler la carte. Évidemment on ne peut pas se sentir bien et s’intégrer, se construire son avenir ou ses projets si tous les six mois on vous dit vous que vous risquez de ne pas être renouvelé alors qu’ils sont renouvelés. »
On estime aujourd’hui à 300 000 le nombre de personnes sans papier en France. Autant de cas dont les titres de séjours sont régulièrement renouvelés, mais qui ralentissent l’administration.
Les experts proposent que la carte de base soit une carte de cinq ans et que la carte de dix ans devienne une carte permanente comme une Green Card américaine, explique encore Patrick Weil. « Nous proposons de créer de nouveaux titres, des titres de circulation, des titres d’aller-retour qui permettent soit à des personnes qui ont des diplômes, soit à des saisonniers de pouvoir être sûrs de pouvoir circuler et revenir régulièrement entre leur pays et la France. »
Selon les chiffres publiés ce mardi par le ministère de l’Intérieur, les étudiants devancent pour la première fois l’immigration familiale.
Le manque d’une protection environnementale et humanitaire, qui n’existe pas en tant que telle actuellement, est également pointé par le rapport. Cette protection doit faire l’objet d’une convention internationale notamment pour permettre de répondre à la question des déplacés environnementaux.
Quant à la migration de travail, dont le système est « fait pour ne pas marcher », elle doit faire l’objet de discussions avec les partenaires sociaux pour identifier « les entreprises qui ont des besoins qui ne sont pas satisfaits », affirme Pascal Brice.
Avec AFP