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Guinée : un peuple complètement déshumanisé (Par Tierno Monénembo)

Je maintiens l’idée que quand le président est mauvais, tout est mauvais. Impossible d’échapper à cette sagesse presque paysanne qui tombe sous le sens comme tout ce qui vient des gens de la terre.

Sans doute, la Guinée, de tous les pays de la planète, est celle qui va le mieux avec cette formule-là. Dieu a fait de ce pays un paradis et la politique, un enfer. Les dirigeants qui se sont succédé à sa tête ne pouvaient nous mener que là où nous, nous trouvons aujourd’hui : une économie en ruine et une société en lambeaux.

Qu’ils s’appellent Sékou Touré, Lansana Conté ou Alpha Condé, aucun d’entre eux n’a porté ces valeurs qui forgent un véritable leader, c’est-à-dire un homme susceptible de mener un peuple à bon port à travers les bourrasques de l’Histoire : la grandeur d’âme, la générosité de cœur et la clairvoyance. Guider un peuple, cela revient à l’élever à un certain niveau intellectuel et moral. De ce point de vue-là, dans notre pays, c’est raté.

Nos dirigeants manquent cruellement de discernement  mais comme tout animal politique, ils ont du flair. Ils savent comment obtenir un régime médiocre et invincible : saboter l’instruction et favoriser la débauche. Un peuple abruti, un peuple perverti ne représente aucun danger. « Gouverner, c’est mettre vos sujets hors d’état de vous nuire et même d’y penser. », disait Machiavel.

Ils ont effectivement mis le peuple de Guinée hors d’état de leur nuire. Pour commencer, ils ont coupé un à un les liens multiséculaires qui soudaient nos ethnies, nos régions et nos cultes, ce qui nous a énormément affaiblis.  Ensuite, ils ont ôté de notre société le sens de la vertu et celui de l’honneur. Enfin, ils ont développé à outrance la flemme et la courtisanerie. Cela donne cette Guinée médiocre d’aujourd’hui où chacun décuple les louanges pour manger dans la main du petit chef.

Tous les beaux principes qui faisaient la grandeur de nos aïeux ont disparu. Où sont partis les hommes honnêtes d’antan ? Des notions comme le respect, la franchise, la bravoure, l’esprit de solidarité, l’amour, la fraternité ont-elles encore un sens dans ce pays de sadiques qu’est devenu le nôtre ?  A part le kôbiri, quelle autre valeur sûre régit notre vie en commun ? Aucune ! Entre le frère et la sœur, l’argent ! Entre la mère et le fils, l’argent !…Au point que la fonction sociale du dollar est plus importante ici qu’à New- York ou à Philadelphie.

La Guinée, comme toutes les sociétés avachies, est devenue le pays du « n’importe qui et du n’importe quoi ». Tout le monde est égal. Tout le monde a le même âge, le même rang social,  la même valeur intellectuelle et humaine. Aucune ségrégation basée sur le mérite !

La valeur intrinsèque n’existe plus. Aujourd’hui, c’est l’objet que vous tenez à la main qui vous personnifie. « C’est le Monsieur de la moto ou alors, c’est celui de la Honda, voire celui des briques rouges ou de la maison verte !» Même le respect dû aux anciens a disparu.

Nous ne sommes plus la fière nation de Samory Touré et d’Alpha Yaya Diallo, de Dinah Salifou et de Zegbéla Togba. Nous sommes devenus une somme de petites gens,  une assemblée de zombies que n’importe quel tyranneau de village  peut couillonner et martyriser à merci.

La bassesse humaine a eu raison de la belle et grande Guinée.

Tierno Monénembo, in Le Lynx

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